Depuis plusieurs années, le bioéthanol s’est imposé comme une alternative crédible aux carburants fossiles, avec un double avantage : un prix attractif et une empreinte carbone réduite. Pourtant, un rapport du Secrétariat Général à la Planification Écologique (SGPE) remet en question cette fiscalité avantageuse. Objectif officiel : accélérer la transition vers l’électrique en rendant les carburants thermiques, y compris les biocarburants, moins compétitifs. Mais derrière cette justification écologique, l’impact sur les consommateurs et la filière agricole pourrait être désastreux.
Une hausse des taxes sur l’E10 et l’E85 : pourquoi maintenant ?
Selon un document révélé par Challenges, le gouvernement envisage de supprimer l’exonération fiscale dont bénéficient actuellement l’E85 et l’E10. L’E85, vendu en moyenne 1 euro de moins par litre que le SP95-E10, et l’E10, premier carburant en France, pourraient connaître une augmentation significative de leur prix.
Cette décision ne tombe pas du ciel. L’État cherche à combler un manque à gagner de 500 millions d’euros lié aux exonérations fiscales sur ces carburants. En parallèle, cette manne financière servirait à financer la transition vers l’électrique, notamment via les aides pour l’achat de véhicules propres. Pourtant, malgré le leasing social et les bonus écologiques, les ventes de voitures électriques peinent encore à atteindre les objectifs fixés par le gouvernement.
Un impact direct sur les automobilistes et les agriculteurs
Si la suppression de l’avantage fiscal est confirmée, les automobilistes roulant au bioéthanol risquent de voir leur facture exploser. Actuellement, l’E85 coûte environ 1 €/litre contre 1,70 €/litre pour le SP95-E10. Avec une fiscalité alourdie, ce carburant perdrait toute attractivité financière. Une pilule difficile à avaler pour ceux qui avaient choisi cette option à la fois économique et écologique.
Mais la hausse des prix ne toucherait pas que les automobilistes. La filière agricole française, qui produit le bioéthanol à partir de betteraves et de céréales, subirait un véritable revers. Comme l’indique la filière bioéthanol, cette hausse de taxation pourrait mettre en péril près de 9 000 emplois et fragiliser des milliers d’exploitations.
Un choix politique à contre-courant des engagements écologiques
Si l’objectif affiché est de verdir le parc automobile en encourageant l’adoption de l’électrique, cette mesure soulève des incohérences majeures. Le bioéthanol permet une réduction des émissions de CO₂ de 70 % par rapport à l’essence classique. L’alourdissement de sa fiscalité risque donc de pousser les automobilistes vers des carburants plus polluants, au lieu d’accompagner une transition énergétique progressive et équilibrée.
Cette décision s’ajoute à d’autres mesures fiscales récentes, comme l’augmentation du malus écologique sur les véhicules thermiques et la suppression de certaines aides fiscales pour les flottes professionnelles. Une approche qui ressemble davantage à une taxation punitive qu’à un véritable accompagnement vers des solutions de mobilité plus vertes.