Surprise dans les bilans mensuels du marché automobile en France : Tesla, le géant californien de la voiture électrique, a enregistré en mars 2024 ses pires ventes depuis quatre ans. Avec seulement 1 255 immatriculations selon les chiffres AAA Data, la marque d’Elon Musk voit son dynamisme sérieusement freiné sur l’un de ses marchés stratégiques en Europe. Comment expliquer cette contre-performance soudaine ?
Un mois de mars noir pour Tesla France
Depuis que la Model 3 s’est imposée comme la meilleure vente de VE dans l’Hexagone, Tesla n’avait jamais connu une telle baisse. En mars 2023, sur le même mois, ce sont 5 221 véhicules qui avaient été immatriculés. En un an, cela représente une chute vertigineuse de 76 %, largement au-dessus de la baisse globale du marché des véhicules électriques en France. En comparaison, MG a vendu 1 602 véhicules, Renault 3 317 avec sa Mégane E-Tech et Peugeot 2 825 grâce à ses 208 et 2008 électriques.
Ce plongeon soulève des questions majeures. D’autant plus que la demande pour les voitures électriques reste forte en France, portée par des objectifs environnementaux ambitieux et une fiscalité incitative (bonus écologiques, avantages malus CO2, etc.).
Musk, facteur de division pour l’image de Tesla
L’ombre d’Elon Musk plane sur ces chiffres inquiétants. Le patron de Tesla, habitué des prises de parole controversées et d’une communication parfois clivante sur X (anciennement Twitter), suscite l’exaspération d’une partie des clients européens. Plusieurs observateurs notent que les positions libertariennes de Musk, ses polémiques sur la modération des contenus en ligne et ses liens supposés avec des mouvances politiques extrêmes pourraient porter atteinte à l’image de Tesla sur certains marchés occidentaux.
En France, il semble que ce rejet se manifeste plus activement : de nombreux témoignages évoquent un malaise à l’idée de soutenir une entreprise pilotée par un dirigeant aussi polarisant. Difficile d’ignorer que l’achat d’une voiture n’est plus neutre, surtout dans le segment des véhicules électriques, où l’image de marque est un facteur d’achat primordial.
Un contexte défavorable sur plusieurs fronts
Outre les facteurs liés à l’image du patron, Tesla subit une double peine : des nouveautés attendues qui tardent à arriver (notamment le restylage de la Model Y en Europe), un ralentissement de la production en Chine, et surtout, des subventions publiques qui se rétractent ailleurs dans le monde. Au Canada, par exemple, Tesla est déjà dans une position délicate suite à la suspension de certaines aides à l’achat – un sujet que nous avions abordé en détail concernant la situation canadienne.
En parallèle, la concurrence se fait de plus en plus consistante. Renault, Peugeot, MG ou encore BYD – tous proposent des produits au rapport prix/équipements très compétitifs, séduisant une clientèle de plus en plus sensible au positionnement tarifaire des VE. Tesla, malgré sa politique de prix agressive en 2023, n’a pas réussi à renouveler l’exploit cette année avec des gammes qui stagnent en innovation esthétique et technologique.
Quels enjeux pour les mois à venir ?
Cette contre-performance de mars ne signifie pas une fin de règne immédiate pour Tesla. Mais elle met en lumière un tournant stratégique majeur : l’entreprise devra redoubler d’efforts pour conserver sa position dominante en Europe, notamment en repensant sa communication, en revitalisant son offre produit et en adaptant ses prix aux réalités locales. Sans actions concrètes, Tesla pourrait perdre rapidement son avance dans un marché où la fidélité des consommateurs n’est jamais garantie.
La marque compte toutefois sur le lancement du Cybertruck (prévu en Europe sous conditions d’homologation) et sur la future génération de Model 2, attendue comme une solution plus abordable. Des atouts à ne pas négliger… mais qui arriveront peut-être trop tard pour sauver une année 2024 morose.